COMOR

Au niveau régional, la pêche des coquilles Saint-Jacques dans la Baie de Seine constitue une activité économique essentielle pour plus de 200 navires de pêche du littoral de la Manche Est (de la Normandie aux Hauts de France). Dans le seul gisement classé de la baie de Seine, la pêche de cette espèce dure d’octobre à mai, pour une production oscillant selon les années entre 5 et 20 000 tonnes. Cette pêcherie est très largement encadrée par un système de réglementations mis en place par la profession, et validée par l’Administration des pêches. En Manche Est, trois systèmes se superposent et se complètent : des réglementations européennes (notamment la taille minimale fixée à 11 cm), nationales (tout navire susceptible de pêcher la coquille Saint-Jacques doit disposer d’une autorisation de pêche, délivrée par la Direction des Pêches Maritimes, et est dans ce cadre soumis à un certain nombre de contraintes d’ordre technique) et régional (licences de pêche pour le gisement classé de la baie de Seine déterminant le nombre, les caractéristiques techniques des navires et des engins et le niveau de l’effort de pêche sur zone).

Depuis de nombreuses années, l’Ifremer assure le suivi de cette ressource. Afin d’établir un diagnostic annuel sur l’état du stock de coquilles Saint-Jacques de la baie de Seine, une évaluation directe de la ressource est menée chaque année. Les données recueillies lors des campagnes annuelles d'évaluation directe COMOR sont à la base de l'expertise. Les résultats obtenus permettent à la profession et à l’Administration des pêches d’avoir une image exhaustive de l’état de la ressource avant le démarrage de la campagne de pêche, et d’organiser la saison en conséquence. Le mode de gestion à court terme, retenu actuellement et exigeant une campagne annuelle du N/O Thalia, s'avère très apprécié des divers partenaires de l'Ifremer, qui agit ainsi au titre du Service Public tout en disposant en retour d'un atelier pédagogique de premier plan en matière de transfert des connaissances et des modalités de gestion. Par ailleurs, l’ensemble des campagnes halieutiques menées par l’Ifremer, dont les campagnes « coquilles », sont intégrées dans le Système d’Informations Halieutiques, dont la vocation est de recueillir les données d’observation et de surveillance de la filière halieutique, indispensables dans le cadre de la mission de service public de l’Ifremer.

Objectifs de la campagne

L’objectif principal vise à proposer des estimations de la biomasse exploitable, d'un indice quantitatif du recrutement (prochaine génération à entrer dans les captures) et du pré-recrutement (dernière génération née, non encore accessible de par leur taille aux engins de pêche), et des paramètres de croissance.

L’utilisation des données recueillies lors de cette campagne et leur intégration dans une base de données permettant la constitution de séries chronologiques longues, permet par ailleurs d’alimenter des projets de recherche autour de la coquille St-Jacques.

Méthodologie et stratégies d’acquisition de la donnée à bord

Les mêmes principes fondamentaux sont respectés chaque année lors de l'application des plans d'échantillonnage :

(i) Engins de pêche expérimentaux : Il s'agit des dragues à volet de 2 m de largeur. Pour les deux campagnes, les sacs de celles-ci sont munis d'anneaux métalliques de 50 mm. Pour la campagne COMOR, un second engin de pêche à 72 mm de diamètre est également adopté.

(ii) Structure en âge et en taille des populations : Les captures sont structurées en âge à laquelle une structure en taille au sein des groupes d'âge est ajoutée. Les estimateurs finaux obtenus sont des abondances et biomasses par groupe d'âge et par taille accompagnés des variances respectives.

(iii) Stratification spatiale : Les aires totales sont subdivisées en strates spatiales qui correspondent à des unités de concentration des navires de pêche selon de grandes zones de production et à des sous-ensembles homogènes en terme de colmatage des engins de pêche expérimentaux. Les protocoles appliqués relèvent d’une stratégie d’échantillonnage aléatoire stratifié.

(iv) Standardisation des unités d'échantillonnage : L'équiprobabilité des échantillons est respectée par l'adoption d'unités d'échantillonnage constantes par strate spatiale.

Distances des traits : En baie de Seine, la densité relativement faible des coquilles sur le fond implique l'adoption d'unités d'échantillonnage étendues afin de ne pas dégrader les estimateurs d'abondance et de biomasse à des simples variables de type présence-absence. L’unité de base est ½ mille.

Efficacité des engins de pêche et nombre de dragues : En baie de Seine, les distances d’échantillonnage assez longues et les profondeurs élevées contraignent de se limiter à des estimateurs basés sur l'efficacité relative des dragues ; dans ce sens, les maillages des dragues employées sont doublés (adoption de 72 mm à côté du maillage commun de base de 50 mm) afin de procéder à un échantillonnage par niveau selon le groupe d'âge.

Rappel du plan d’échantillonnage

Un plan d’échantillonnage aléatoire stratifié est appliqué. La stratification adoptée depuis 1998 dans ce plan d’échantillonnage permet d’une part de garder l'identité des trois grandes zones de production (Proche Extérieur, baie de Seine Orientale et baie de Seine Occidentale) afin de maintenir l'homogénéité de la série historique et d’autre part de définir des strates homogènes en termes de colmatage des engins de pêche d’une part et de présence de coquilles sur le fond d’autre part. Jusqu’en 2014, l’aire totale de prospection était subdivisée en 5 strates spatiales : Proche Extérieur au nord de la zone, exploitée par l’ensemble de la flottille hormis les petites unités (1094 km²), strates 1 à 4 à l’intérieur du gisement classé de la baie de Seine, d’est en ouest. En 2015, la stratification a été revue pour ne garder que 3 strates à l’intérieur de la baie de Seine, la strate 4 située la plus à l’ouest de la baie n’étant plus prospectée (seule la partie Est de cette strate a été conservée, et intégrée à la strate 3 dont elle présente des caractéristiques identiques). Les strates résultantes correspondent à des unités de concentration des navires de pêche selon leur port de provenance, ainsi qu’à des types de fond différents (respectivement 412, 302 et 309 km² pour les strates 1 à 3). L’aire totale prospectée est de 2117 km², soit quatre fois plus qu’en baie de Saint-Brieuc (Fig. 1).

Date et durée de la campagne

Depuis une vingtaine d’années, la campagne a lieu en juillet, à l'expérience le meilleur compromis entre une pousse suffisante des coquilles du groupe 1, plus rapide en baie de Seine qu’en baie de St-Brieuc et permettant leur capture par les dragues, et l'élaboration précoce d'une expertise permettant aux acteurs (administratifs, organisation de marché, commission professionnelle, …) de prendre les mesures les mieux adaptées à la réalité perçue à travers les résultats de la campagne. La saison de pêche débutant le 1er octobre (Extérieur baie de Seine), les résultats scientifiques de la campagne doivent parvenir à l’Administration des pêches début septembre, ce qui nécessite une prospection précoce en juillet.